Cette œuvre illustre une expérience personnelle que j'ai vécue : l'emprisonnement de soi, où il faut se diviser pour survivre. En prison, je n'avais pas le choix. Une partie de moi vivait dans ma cellule, une autre, bien différente, apparaissait lors des promenades, un masque que je devais porter pour affronter l'extérieur. Cette image représente cette dualité, avec un homme arabe dont le visage est littéralement fendu en deux, symbolisant la scission entre la personne que l’on est réellement et celle que l’on doit devenir pour faire face à l’isolement et aux contraintes de l'enfermement.

Les deux côtés du visage sont contrastés. D'un côté, il y a le regard franc, dur, comme une défense contre la réalité crue de la cellule. De l'autre, un air plus détendu, une façade que l'on arbore pour interagir avec le monde extérieur, même si au fond de soi, tout est fragile. Cette division représente les masques que l’on porte pour se protéger, mais aussi la nécessité de se dépersonnaliser pour affronter une situation extrême.

J’ai voulu capturer cette fracture interne qui naît lorsqu’on se retrouve pris dans un système où l’on doit constamment jongler entre qui l’on est et ce que l’on doit être. Cela fait écho à cette lutte intérieure qui se déroule dans chaque situation où l’on perd un peu de soi-même. La prison, pour moi, n’était pas seulement un lieu physique, c’était un état d’esprit qui demandait de séparer les parts de soi pour pouvoir exister.

Cet homme arabe est à la fois un symbole de force et de vulnérabilité. Il représente cette capacité à survivre tout en se fragmentant, mais aussi cette prise de conscience qu’au bout du compte, cette division est temporaire. Le portrait montre cette dualité entre le monde intérieur et l’extérieur, un face-à-face constant avec soi-même. Chaque cicatrice de l’âme devient un masque, une partie de soi qui se transforme, qui se cache, mais qui est toujours présente, toujours en quête de reconnaissance.

L’idée derrière cette œuvre est d’explorer ce déchirement intérieur, ce sentiment d’être contraint de devenir quelqu'un d’autre pour faire face aux défis, tout en sachant que l’on se perd un peu à chaque fois. C’est une réflexion sur l’identité, la survie, et la manière dont la prison ne se limite pas aux murs d’une cellule, mais peut également être une bataille psychologique où l’on doit se diviser pour espérer rester entier.